Politique & social

Metz métropole « sans boussole » pour son budget 2025, voudrait emprunter 55 millions d’euros

Réunis en conseil communautaire ce lundi 16 décembre 2024, les élus de la métropole de Metz ont dû se livrer à un exercice complexe : tenir un débat d’orientation budgétaire (DOB), étape préparatoire et essentielle à la réalisation du budget 2025, mais sans savoir quelles seront les dotations exactes du gouvernement, en l’absence d’un projet de loi de finances.

Photo du conseil métropolitain du 16 décembre 2024.

« Nous sommes dans l’incertitude économique la plus périlleuse. L’État nous fait les poches tout en nous imposant des dépenses supplémentaires. Il pointe du doigt les collectivités locales alors qu’il impose les règles », s’insurge Thierry HORY, vice-président de la métropole délégué aux finances.

Dans leur version soumise au Parlement, les Projet de Loi de Finances et Projet de Loi de Finances de la Sécurité Sociale (PLFSS), ainsi que la révision des hypothèses de croissance 2024 de la TVA nationale, impactent la métropole à hauteur de 9 M€ en 2025, somme à laquelle s’ajoutera encore, chaque année, l’équivalent de 3 points supplémentaires du taux de la CNRACL [NDLR : Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales], soit 0,9 M€ par an, sur les années 2026 à 2028. Pour mémoire, la baisse des dotations de l’Etat entre 2013 et 2017 s’était élevée, en cumulé, à 10 M€ étalée sur une durée de 4 ans, il est donc demandé aux collectivités de faire le même effort en un à deux ans au lieu de 4. C’est ainsi une très forte dégradation des ratios financiers, et notamment des niveaux d’épargne de la collectivité, qui en résultera, de même qu’une remise en cause de l’équilibre du prochain Budget Primitif tel qu’il avait été anticipé.

Extrait de la synthèse du rapport sur les orientations budgétaires 2025

Alors « qu’aucun nouvel emprunt n’a été contracté par la métropole depuis 2021 et que l’encours de la dette devrait donc atteindre 158 millions d’euros fin 2024 », comme le précise le VP aux finances, la collectivité ferait le choix de s’endetter à nouveau, en deux temps.

« Nous allons faire un nouvel emprunt à hauteur de 5 millions pour le budget principal 2024 en cette fin d’année, d’ici quelques jours. Mais, du fait du fort désendettement opéré ces dernières années, la dette de l’Eurométropole est soutenable et permet d’envisager de nouveaux emprunts à venir pour financer la montée en puissance du budget d’investissement. Pour autant, la stagnation des recettes couplée à l’augmentation des dépenses requiert la prudence pour préserver nos équilibres, d’autant plus qu’il est impossible de dire à ce jour ce que contiendra la prochaine loi de finances »

Intervention de Thierry HORY au conseil métropolitain le 16/12/2024

Au vu de la conjoncture morose, la collectivité s’attend à une stagnation de ses recettes et une accélération des dépenses sous l’impact de l’inflation et du développement de nouvelles politiques publiques. Les dépenses de fonctionnement du budget principal devraient atteindre 186 millions d’euros, tandis que les recettes sont estimées à 203 millions d’euros. L’épargne brute dégagée serait par conséquent de 17 millions d’euros.

Du côté des investissements, les dépenses devraient nettement augmenter pour atteindre 118 millions d’euros, en raison de la montée en puissance du Plan Pluriannuel d’Investissement (PPI). Avec des recettes d’investissement prévues à hauteur de 45 millions d’euros, un emprunt d’équilibre de plus de 55 millions d’euros serait nécessaire en 2025.

L’opposition s’inquiète, et alerte

Jérémy ROQUES, conseiller métropolitain d’opposition (gauche), a tout d’abord évoqué la situation du pays, dénonçant « les politiques des gouvernements successifs libéraux de droite » et d’un « ex-gouvernement que François GROSDIDIER a défendu », avant de revenir aux questions budgétaires locales :

« À cette austérité imposée par l’État, vous avez décidé d’ajouter l’austérité locale. Pourtant, nous avons les moyens de faire autrement, notamment en supprimant des politiques superflues. Par exemple, une nouvelle augmentation de 400 000 euros pour la Serpentine, dont le budget continue de déraper, atteignant maintenant presque 5,5 millions d’euros au total, entre la ville et la métropole.

Il y a aussi la création d’une AP [NDLR : autorisation de programme] concernant les études et les travaux d’un réseau privé métropolitain (RPM), à hauteur de 5 millions d’euros. Le RPM, c’est le coût imprévu des caméras de sécurité, puisqu’il s’agit du lien entre le futur centre de supervision et les caméras des communes. Cela vient s’ajouter au million d’euros dépensé dans le déploiement de la vidéo-surveillance. »

Intervention de Jérémy ROQUES au conseil métropolitain le 16/12/2024

Jérémy ROQUES termine son intervention en évoquant des possibles économies à faire sur le budget communication et les navettes fluviales. « Des économies ? Oui, faire des économies, c’est ce que vous déclarez dans votre DOB sans nous dire toutefois dans quel domaine vous souhaitez les réaliser », surenchérit ensuite Danielle BORI (gauche). Si elle admet que l’« exercice est compliqué », elle affirme qu’« aucune piste n’est tracée dans ce DOB ».

La conseillère métropolitaine s’inquiète en premier lieu de l’impact des choix budgétaires sur les questions sociales :

« Il y a un domaine absent dans ce document, comme trop souvent, celui de la question sociale. Elle est une priorité et doit traverser toutes nos politiques publiques. Il en va de la cohésion sociale, moteur du développement de nos territoires. »

Intervention de Danielle BORI au conseil métropolitain le 16/12/2024

De son côté, Françoise GROLET, conseillère métropolitaine (RN), dénonce une « logique punitive des gouvernements précédents, de droite mais aussi de gauche, qui attaquent l’échelon de proximité » car incapables de « se réformer ni s’attaquer aux mauvaises dépenses ».

L’impact prévisionnel des annonces, qui reste à confirmer par le nouveau gouvernement, représente un manque à gagner de 9 millions d’euros dès 2025 pour la métropole. Face à ces « nuages noirs », la conseillère métropolitaine appelle à un changement de cap de la majorité :

« La situation appelle une réaction, une réaction en responsabilité. Et là, dans le rapport d’orientation budgétaire, on lit une phrase qu’on attend depuis longtemps et que j’ai plusieurs fois prononcée : Cette situation impose de nous recentrer sur nos compétences. Enfin ! Et vous ajoutez, sans diminuer le niveau de service à la population et sans augmenter les impôts. Évidemment, c’est un soulagement pour nous. Quand je reviens sur les compétences, vous dites donc qu’il faut nous recentrer. Ce qui signifie que vous êtes dispersés dans des domaines qui ne relèvent pas de notre responsabilité. »

Intervention de Françoise GROLET au conseil métropolitain le 16/12/2024

La conseillère souhaite par ailleurs « freiner les engagements coûteux de l’écologie punitive ». « Nous allons finir écologiquement responsable mais ruinés. Alors arrêtons de culpabiliser les Français qui sont déjà bien plus vertueux que certains d’autres pays » ajoute-t-elle.

« Vous annoncez donc vouloir emprunter plus de 55 millions d’euros. L’exercice budgétaire 2024 mobilise un emprunt de 5 millions d’euros en décembre. C’est donc une augmentation de l’endettement de plus de 1000 % que vous proposez dans ce rapport d’orientation budgétaire, où l’on voit zéro liste d’économie. »

Intervention de Françoise GROLET au conseil métropolitain le 16/12/2024

« La dette est l’impôt de demain », rappelle Françoise GROLET, qui appelle la majorité à « plus de responsabilités » à l’approche du budget primitif. Cette intervention sera dernière de Françoise GROLET devant le conseil métropolitain, l’élue ayant fait le choix de se retirer de son mandat. Marie-Claude VOINÇON devrait logiquement la remplacer.


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