Economie & emploi

Résultats de l’audit : changements en vue du côté de Bliiida

François GROSDIDIER et ses adjoints et délégués à Metz Métropole ont dévoilé ce vendredi 21 mai 2021, les résultats d’un audit réalisé au sujet de l’association pilotant Bliiida par le cabinet E&Y, « le tiers lieux d’inspiration, d’innovation & d’intelligence collective » de Metz, et les décisions qui ont résulté de cette analyse, visant à recadrer le projet avec pour principale motivation, la rationalisation de son modèle de financement, reposant actuellement à 63% sur des fonds publics.

Les réorientations de Bliiida ont été présentées en conférence de presse au siège de Metz Métropole le 21 mai 2021 par (de gauche à droite sur la photo) Patrick THIL, Jacqueline SCHNEIDER, François GROSDIDIER, Claire ANCEL, Cédric GOUTH et Jean-Marie NICOLAS

Bliiida, l’un des projets emblématiques de la métropole et de la mandature précédente verra un certain nombre de réorientations se mettre en place dans les mois et années à venir : diminution du budget des travaux, changement d’affectation ou cession de locaux et d’espaces, clarification du fonctionnement pour les résidents ou encore changements dans la gouvernance et même affectation d’une partie du foncier aux pompiers. Objectifs, selon le titre même du communiqué de presse, « la redéfinition et la relance d’un modèle flou et en péril ».

Du côté de l’opposition, Xavier BOUVET dénonce « un gâchis, des travaux abandonnés sans aucune vision de substitution, des propos hostiles de l’équipe dirigeante qui ont abimé l’image du lieu et fait fuir certains partenaires privés », ainsi qu’un pilotage effectué délibérément sans pilote depuis l’arrivée aux affaires des nouveaux élus :

« Quand on veut noyer son chien, on dit qu’il a la rage » paraît-il. Il y a encore mieux : le négliger tellement et être si irresponsable, que le chien finit vraiment par tomber malade.

Cet audit (que personne n’a jugé bon de transmettre aux administrateurs) s’intéresse manifestement à des points de fond valables. Encore faudrait-il que les élus qui en disposent s’en saisissent avec intégrité et ambition.

Xavier BOUVET

Où est le problème ?

De par sa nature même et depuis sa création (bien avant même, si l’on compte ceux qui avaient tenté de torpiller le projet), Bliiida offre un profil expérimental en constante évolution qui prête le flan à pas mal d’incompréhension, et donc à la critique.

Tant bien que mal, l’équipe de Bliiida et la structure associative aujourd’hui remises en question ont en même temps fait évoluer le lieu, son fonctionnement, son modèle économique (lire plus bas) en lien avec la SAEML Metz Technopole en charge, partiellement seulement, de la gestion locative, mais toujours avec la caution et le soutien des instances et des élus en place. Se faisant, les critiques liées à l’incompréhension ou à la défense d’autres intérêts ont été remplacées par « des trous dans la raquette » identifiables au moment de l’évaluation après 5 ans d’existence.

L’audit diligenté par François GROSDIDIER (à télécharger en cliquant ici) a selon lui « confirmé son intuition » en ce qui concerne les carences constatées. L’association en charge de l’administration des lieux en prend pour son grade. On y retrouve entre autres : « un manque de vision stratégique sur les enjeux et le positionnement, un modèle économique peu pérenne et non-piloté, des modalités de gestion faisant apparaître un besoin de professionnalisation, ou encore une incapacité à s’adapter », mais c’est surtout sa trop grande dépendance aux financements publics qui est principalement montrée du doigt, car une augmentation mécanique de ces derniers aurait été nécessaire au fil des années.

Un « problème de lisibilité organisationnelle et économique », auquel s’ajouteraient des « faiblesses structurelles aggravées par la crise sanitaire » et enfin des pratiques de gestion jugées « illégales » qui impliquent selon le président de Metz Métropole de revoir le projet tout entier, comme il l’explique à notre micro :

Ce qui va changer

L’audit, qui s’est concentré uniquement sur l’association pilotant le bâtiment, aurait ainsi impliqué de redéfinir les orientations stratégiques du lieu et des rôles des parties prenantes. En bref, un changement partiel de cap pour Bliiida qui deviendra notamment un centre de ressources dédié à la culture (par sa mise en réseau avec les autres structures métropolitaines), à l’ESS1, à l’ICC2 et à l’expérimentation.

Parmi les principales mesures, on notera que les startup du secteur numérique conserveront leur bâtiment actuel, idem pour les acteurs de la culture, mais avec des règles d’occupation clarifiées, et plus strictes. L’idée sera de poursuivre la souplesse du modèle d’accompagnement des jeunes entreprises, en partie issues de l’incubateur « The Pool », mais de limiter la durée de leur présence dans les locaux.

Bliiida sera partiellement réaffecté à l’ESS et à l’ICC, quant au budget de 12 millions d’euros de travaux qui étai prévu pour les travaux aux quatre coins du site, il sera sévèrement raboté (de 50 à 66%) de façon à ne pas augmenter le coût des lieux pour la collectivité. Une partie du site pourrait d’ailleurs être vendue à un acteur de l’ESS (on parle ici du bâtiment des anciens abattoirs), quant au reste, il sera dédié à une activité de logistique urbaine pour les livraisons du dernier kilomètre liées entre autres à la plateforme de e-commerce local, et une partie du foncier devrait accueillir des pompiers du SDIS lorsque ceux-ci auront déménagé de leur caserne actuelle du Boulevard Maginot.

Bliiida, un « objet » parfois déconcertant

C’est l’une des critiques de l’audit réalisé : la difficulté de comprendre l’identité du lieu qui, par nature et par mission, avait été dédié à l’expérimentation et à l’éclosion de nouveaux modèles, n’entrant donc pas forcément dans les grilles de lecture classiques, surtout que la communication avait choisi le ton décalé pour décrire Bliiida :

Créé en 2014 par l’opportunité du départ des bus de la métropole vers leur nouveau centre technique non-loin de la route de Thionville, TCRM Blida (devenu Bliiida entre temps) est très vite devenu un tiers lieux ayant la particularité d’héberger d’un côté des résidences d’artistes et de jeunes artisans créateurs du monde de la culture, et de l’autre des startup du monde numérique.

A redécouvrir ici : la visite des entrailles de Blida en photos

Le projet évoluant et se recomposant sur lui-même, Bliiida a accueilli au fil du temps un espace de coworking (Le Poulailler), un fab-lab (M Design), un restaurant partagé (L’Amour Food), un espace de répétition et d’enregistrement (La Capsule, remplacé par l’espace BPCE), une matériauthèque (remplacée par les locaux de l’ADEME), un atelier photo, une salle d’événements, des locaux d’entreprises de secteur de l’ESS , un jardin et un poulailler partagés, un laboratoire de recherche sur les jeux vidéo de l’université de Lorraine…

Dans l’intervalle, avec l’obtention par l’écosystème des entreprises du numérique du label French Tech, le caractère startup innovantes du secteur numérique s’est affirmé, à tel point que Bliiida devint le siège de LorNtech au sein du Sillon Lorrain (Capitale French Tech), puis plus récemment de French Tech East. Ceci sans pour autant écarter l’activité et les résidences culturelles.

Du côté des résultats, le chiffre d’affaires des résidents était en augmentation constante, et l’association présentait un bilan excédentaire, mais ce dernier serait en trompe l’œil au vu de la part de subventions (400.000€) à laquelle il avait recours, et qui aurait bondi à 600.000€ si le projet « Bliiida 2020 » avait vu le jour.

Côté agenda

Si demain le bâtiment tout entier ne sera pas réaffecté, une page de l’histoire des lieux se tourne. Dès la mi-juillet 2021, une nouvelle convention entre le bailleur et l’association sera mise en place, une nouvelle gouvernance est espérée pour septembre 2021, et le projet de travaux revu en profondeur devrait débuter pour début 2023.


(1) ESS : Entreprise Sociale et Solidaire
(2) ICC : Industries culturelles et créatives

Ville(s) / territoire(s) :
Personnalité(s) :

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