La ville s’adapte aux pratiques et habitudes de son temps. Parmi les différentes composantes de ce qui fait une ville (culture, assainissement, services publics, enseignement, sécurité…) il y en a une qui dénote par le fait que tout le monde l’emprunte quasi quotidiennement : la rue.
A Montigny-lès-Metz, l’inauguration ce 13 mai 2025 du réaménagement de la rue St Ladre, constitue une mise en évidence de ce que deviendront probablement, demain, les rues secondaires de la ville : accessibles et partagées, tout simplement.

Disparition des trottoirs, stationnement préservé mais équipé de pavés drainants pour conserver l’eau de pluie là où elle tombe, végétalisation, ralentisseurs (plutôt doux), zones de mouvements piétons identifiées au sol par un revêtement de couleur, passage piétons à peine signalés car plus d’actualité… tels sont les aménagements auquel les usagers de la rue St Ladre sont désormais confrontés. Un urbanisme pensé pour les mobilités, mais pas que.
La rue : espace partagé par excellence
S’il n’est pas toujours facile de faire cohabiter tout le monde dans un même espace, la rue constitue un cas particulièrement frappant d’une réalité de notre quotidien. Espace partagé par nature, par des personnes qui peuvent changer de « rôle d’utilisateurs de la rue » plusieurs fois dans une journée, et des centaines de milliers de fois dans une vie, la rue est en quelque sorte l’expression la plus concrète de l’adaptation de la ville au vivre ensemble. Jean-Luc BOHL, le maire de Montigny-lès-Metz, en dit plus à notre micro :
Il se passe 1000 choses dans la rue. Ici on promène un bébé dans une poussette ou son chien, là on se balade ou on pratique la course à pieds. Lui part en trottinette à la fac, elle en vélo jusqu’au collège. Ce couple d’actif part au travail en voiture, et reviendra ce soir, le coffre chargé de courses à décharger. Une personne en fauteuil roulant doit se rendre à la boulangerie, cette personne avec une canne blanche se rend à l’église. Ces déménageurs ont une journée pour vider cet appartement, le facteur en véhicule électrique, a quant à lui ses livraisons de colis à gérer, quant à ces retraités, ils s’extasient devant un arbre qui les a vu grandir, ou parlent du bon vieux temps sur le trottoir en regardant des enfants s’amuser.
Autant de scénarios, quelques-uns parmi des milliers d’autres, qui empruntent la rue d’une façon différente, par différents moyens à différentes vitesses, pour différents usages, écrits par des personnes différentes, ou bien les mêmes… selon l’heure de la journée, le jour de la semaine ou la séquence de sa vie.
Un espace de mobilités dans une cour urbaine
La fonction première de la rue est donc avant tout dédiée aux déplacements. Jadis principalement conçue pour les voitures et leur stationnement, la rue s’adapte à son temps, et l’urbanisme tente de réduire les phénomènes d’exclusion que la voirie créait par le déséquilibre du tout voiture. C’est là que se niche le concept de cour urbaine.
La rue Saint Ladre, là où s’ajoutent aux déplacements courants, les sorties imprévisibles de la caserne des pompiers de Montigny-lès-Metz, et celles plus massives et pendulaires de la sortie de l’école, a été réaménagée avec cette nouvelle vision urbanistique.
Elle tente, dans un espace relativement étroit caractéristique des voies secondaires, de permettre la cohabitation de ces foisonnements. Ce qui constituait son principal danger s’est mué en son principal atout : la vitesse. Les aménagement périphériques sont aux-aussi désormais au service de l’échange. En abaissant la limite à 20Km/h, l’espace devient plus apaisé, et ceux qui sont les plus protégés (les automobilistes) peuvent plus facilement identifier les risques. L’impact pour eux sera d’une minute de trajet en plus, sur les 500m de la rue. Cela aussi, est accessible.
A noter que la signalétique est à interpréter comme suit : dans le sens de circulation, le panneau marque l’entrée dans la zone de rencontre à 20 km/h, alors que dans l’autre sens de circulation le traçage au sol marque l’entrée dans la zone 30 qui est désormais étendue à la quasi-totalité de la ville.












Inauguré ce mardi 13 mai 2025 par François GROSDIDIER, président de Metz Métropole (qui a récupéré la gestion des voiries de toutes la communes de l’agglomération), Jean-Luc BOHL, le maire de Montigny-lès-Metz et 1er VP de la métropole, et par Bertrand DUVAL, VP délégué Voirie et espaces publics de la métropole, le réaménagement a été financé à hauteur de 812.000€.
La modernisation de l’espace public constitue un enjeu majeur pour les aspects de sécurité autant que pour ceux de l’environnement. C’est toutefois un espace de tiraillements entre ceux qui utilisent cet espace, et aussi entre ceux qui sont élus pour l’administrer. Le résultat est contrasté entre plusieurs visions qui, chacune, se disent pragmatiques, et le point de vue des habitants, qui sont autant de bulletins de vote, qu’ils conduisent des poussettes, des vélos, des fauteuils roulants ou des voitures.
Si Metz Métropole en est encore très loin, la rue St Ladre témoigne toutefois du fait que le chemin urbanistique pris depuis longtemps par les capitales nord-européennes est la voie à suivre. D’ailleurs l’index « Happy City » semble démontrer que les villes où l’on est le plus heureux de vivre, sont celles qui prennent soin des particularités de chaque habitant, notamment dans ses déplacements et son environnement, mais jamais dans son individualité.
Si chaque réaménagement fait l’objet d’une telle prise en compte au moment où la voirie devient trop abimée, chacun imagine le temps qu’il faudra aux villes pour s’adapter aux mobilités. A moins que le réchauffement climatique ne vienne questionner ce rythme bien plus vite que cela. D’ici-là, il faudra continuer à vivre ensemble, et à partager la rue, que l’on y réside ou que l’on y transite. La rue St Ladre invite désormais ceux qui l’emprunte à vivre « un peu plus slow« .