Dans le cadre de la Biennale du Handicap 2014, Sylvie Caruso, 54 ans, non-voyante, fait une démonstration de l’accessibilité de la piscine toute neuve de Montigny-lès-Metz avec une mise à l’eau de personnes polyhandicapées.
Tout-Metz est allé à sa rencontre dans le cadre d’un dossier de l’été présentant une série d’interviews-portraits de personnes ou artisans passionnés, aux parcours surprenants, exerçant un métier atypique voire méconnu.
Sylvie perd la vue à ses 9 ans. Un handicap qui ne l’empêche pas de voir la vie en rose et de vivre à 100 à l’heure.
Salariée chez Gaz de France, conseillère municipale à la ville de Montigny-lès-Metz, elle est avant tout une grande nageuse qui fait de son handicap une force au quotidien.
Quand et comment cette passion pour l’eau s’est-elle déclarée ?
« J’ai appris à nager vers l’âge de 7 ans, c’est mon papa qui m’a donné le goût des sports nautiques. A cette époque là, je voyais encore étant donné que j’ai perdu la vue à 9 ans, suite à une maladie dégénérescente rétinienne. »
Comment appréhendez-vous le contact avec l’eau depuis que vous avez perdu la vue ?
« Depuis que je suis non-voyante, mon rapport à l’eau s’est complètement transformé. Ce ne sont plus mes yeux qui me guident, mais tous les autres sens. Cependant, ça n’a entamé en rien ma passion de l’eau ».
Depuis combien de temps animez-vous des cours de piscine ? C’est une première à la piscine de Montigny-lès-Metz, ou donniez-vous cours avant ?
« A 20 ans, j’ai eu mon diplôme de maître nageur sauveteur, mais en tant que personne non-voyante, je n’ai pas pu l’avoir officiellement. Depuis mes 19/20 ans, j’anime et j’encadre des jeunes, mais pas nécessairement en situation de handicap. J’ai eu la chance pendant 20 ans, d’avoir des enfants d’agents EDF à qui j’ai pu apprendre à nager.
Depuis 20 ans jusqu’à maintenant, j’ai beaucoup encadré des enfants en situation d’autisme. Je donne des cours à raison d’une fois par semaine à la piscine de Belletanche où l’encadrement est spectaculaire. Les maîtres nageurs font leur travail avec passion, aussi bien avec les personnes valides qu’en situation de handicap »
Votre diplôme officieux vous pose-t-il problème ?
« Dans les années 80, un directeur de la ville de Metz m’a donné la possibilité de faire valoir mon diplôme. J’encadrais des enfants et des adultes, toujours accompagnée d’un maître nageur. Il n’intervenait pas dans ma pédagogie, il était seulement là pour surveiller et superviser en cas de problème. C’était l’idéal ».
Aujourd’hui, êtes-vous toujours encadrée par un maître nageur ?
« Oui, bien sûr, c’est indispensable. »
Pourquoi avoir choisi la piscine, plutôt qu’une autre activité ?
« L’eau apaise, nourrit, ne fait pas mal. Les médecins vous diront toujours qu’après une pathologie lourde, la piscine a de grandes vertus et est accessible à tous. Je baigne dedans depuis toute petite. Je suis née dans l’eau. »
Quelles sont les compétences requises pour être animatrice/maître nageur pour personnes en situations de handicap ?
« La foi, certaines convictions. Il faut de l’humanité, une certaine passion. Il faut y mettre tout votre coeur. Il n’y a pas de mots pour l’expliquer. »
Quel public encadrez-vous ? S’agit-il de personnes souffrant de tout type de handicap ?
[note color= »#ffb9c1″] L’ANECDOTE :« J’ai eu de tout. Aussi bien des enfants âgés de 5/6 ans, des adolescents que des adultes. Dans les créneaux que la ville de Metz réserve pour les personnes en situation de handicap, j’ai fait connaissance avec des maîtres nageurs qui m’ont fait appréhender le travail avec des personnes souffrant d’une pathologie différente de la mienne, comme des personnes en fauteuil, des autistes. J’ai même travaillé à deux, trois reprises avec une personne sourde, muette et aveugle. »
En tant que non-voyante, elle a vécu des situations délicates, comme travailler avec une enfant sourde, muette et aveugle qui était terrorisée par l’eau. Sa douceur naturelle a eu raison de son appréhension. L’enfant s’est apaisée au bout de la deuxième séance seulement.[/note]
En tant qu’élue municipale à la ville de Montigny-lès-Metz, Sylvie Caruso est en quelque sorte le porte drapeau de la cause des personnes en situation de handicap. Affectée au service de l’accessibilité à tous, elle ne compte pas s’arrêter là dans son engagement.
Un projet d’animations estivales verra peut-être le jour au centre nautique de Montigny-lès-Metz ce qui lui permettrait de continuer à mettre des personnes handicapées au contact de l’eau et de leur apprendre à nager.
